PIERRELATTE



Lacroix : Statistiques du département de la Drôme 1835



PIERRELATTE



PIERRELATTE (Petra lata). - Cette petite ville est située sur la grande route de Lyon à Marseille, à 2 kilomètres du Rhône, vis-à-vis du Bourg-Saint-Andéol, 10 nord-est du Pont-Saint-Esprit et 21 sud de Montélimar. Sa population particulière est de 2,388 individus et celle de la commune de 3,447. C'est un chef-lieu de canton et la résidence d'une brigade de gendarmerie à cheval. Il y a un bureau de poste, un bureau d'enregistrement, quatre foires par an, un marché le lundi de chaque semaine, et quelques tanneries. Le territoire produit du vin, des fourrages, des noix et surtout des grains et de la soie.
On ne sait rien de précis sur l'origine de Pierrelatte, si ce n'est que cette ville a fait partie de la petite république des Tricastins, dont Saint-Paultrois-Châteaux, distant de 5 kilomètres, était la capitale.
On explique son nom latin de Petra lata par pierre apportée, à cause du rocher au pied duquel la ville est bâtie. Il eût été tout aussi simple de traduire Petra lata par pierre large, sans un conte populaire qui veut que le rocher n'ait pas toujours occupé cette place. Il se trouve seul au milieu du bassin de Donzère et de Montdragon, à plus d'une lieue de toutes les montagnes qui l'entourent. Comme il est de nature calcaire, et que les montagnes dont il est le plus rapproché sont celles de l'Ardèche, l'auteur de la Minéralogie du Dauphiné, M. Guettard, croit qu'il faisait partie de cette chaîne, dont les montagnes intermédiaires ont été détruites par les eaux, ce qui a couvert toutes ces plaines de sable et de galets.
Il y a eu pendant très long temps un château-fort au sommet de ce rocher. Des Adrets, allant, en 1562, s'opposer aux succès des catholiques en Provence, fut arrêté devant Pierrelatte. Le château, dont il fit le siége, et où commandait le comte de Suze, se rendit par capitulation après une vigoureuse résistance ; mais des Adrets, contre la foi des traités, fit précipiter du haut des murs la garnison tout entière, et passer les habitans au fil de l'épée : ces spectacles d'horreur étaient les plus agréables passe-temps de ce cruel baron.
Il y avait autrefois à Pierrelatte un établissement fort singulier : les jeunes gens choisissaient annuellement parmi eux, avec l'assistance du curé, un chef qu'on appelait l'abbé de la jeunesse (1) (1) En certains lieux de la Provence, on appelle aba (abbé) le chef des danses ; c'est celui qui préside aux jeux et qui prie à danser ; il indique l'heure et le lieu du bal. Dans le Comtat-Venaissin, on le nomme l'abbé de la jouinesse. (Dict. des Origines, tome I, page 3.). Cette société jouissait de plusieurs fonds de terre, dont elle employait le produit à des prières, à des travaux d'utilité publique et à des divertissemens. Ces fonds avaient été donnés par une vieille fille, nommée Soubeyran, qui vivait dans le XIIme siècle. Elle avait institué l'abbé de la jeunesse son héritier universel, à condition que la société ferait acquitter un certain nombre de messes pour le repos de son ame, et que, rassemblés sous le drapeau de la compagnie, les jeunes gens de Pierrelatte iraient tous les ans sur son tombeau le dimanche des Brandons, amenant autant de filles qu'ils pourraient, ayant à la main un petit cierge rouge allumé, pour y faire la farandole, en chantant : Requinquezvous, belles ! requinquez-vous donc ! Un des jeunes gens portait un romarin orné de rubans. On se rendait ensuite sur la place publique, où l'on brûlait, toujours en chantant, ce romarin, après l'avoir arrosé de trois verres de vin. La société a été dissoute par arrêt du parlement, et ses biens ont été réunis à l'hôpital (2) (2) Almanach général du Dauphiné, pour l'année 1788, page 329..
Il y avait dans cette commune, avant la révolution, une collégiale composée de sept chanoines. Elle avait été fondée par Louis XI, en 1475.
Le juge Aymar, qui a publié en 1692 l'histoire de Bayard et celle du marquis de Courbon, est né à Pierrelatte.
C'est aussi la patrie de Jean-Antoine Brun, plus connu sous le nom de Lebrun-Tossa, né le 24 septembre 1760. Il est auteur des ouvrages suivans : 1° Apothéose de Charlotte Corday ;Alexandrine de Bauny, ou l'innocence et la scélératesse, 1797 ; 3° le Terne à la loterie, ou les aventures d'une jeune dame, écrites par elle-même, traduction de l'italien, 1800, in-12 ; 4° Mes révélations sur M. Etienne, les Deux gendres et Conaxa, 1812, in-8° ; 5° Supplément à mes révélations, en réponse à MM. Étienne et Hoffmann ;Eh ! que m'importe Napoléon ! brochure de circonstance, in-8°, 1815.

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